L’ethnie Tày : Un patrimoine vivant dans les montagnes du Vietnam
Au cœur des régions montagneuses du nord du Vietnam, l’ethnie Tày perpétue un héritage culturel riche et diversifié, faisant d’elle la deuxième plus importante minorité ethnique du pays. Avec une population de 1,6 millions d’individus répartis en cinq sous-groupes distincts, les Tày incarnent un équilibre fascinant entre traditions ancestrales et adaptation au monde moderne.
Une présence marquante dans le paysage ethnique vietnamien
Les Tày, second groupe ethnique du Vietnam après les Viet (Kinh), se distinguent par leur répartition géographique et leur diversité culturelle. Composés des sous-groupes Tho, Ngan, Phen, Thu Lao et Pa Di, ils occupent principalement les zones montagneuses du nord, avec une présence notable dans les provinces de Lang Son, Tuyen Quang, Ha Giang, Bac Kan, Yen Bai, Thai Nguyen et Lao Cao. On les retrouve également, bien qu’en moindre mesure, dans des régions centrales comme Dak Lac.
Linguistiquement, les Tày s’inscrivent dans le système Tay-Thaï, partageant des caractéristiques communes avec l’ethnie Thaï. Cette proximité linguistique témoigne des liens historiques et culturels tissés entre ces communautés au fil des siècles.
Un mode de vie ancré dans la tradition
L’habitat traditionnel Tày se caractérise par ses maisons sur pilotis, une architecture adaptée à l’environnement montagneux et aux conditions climatiques locales. Cette particularité architecturale n’est pas seulement fonctionnelle ; elle reflète également une philosophie de vie en harmonie avec la nature.
La polyvalence professionnelle est une caractéristique marquante de la communauté Tày. Excellant dans divers métiers tels que l’agriculture, la culture, le tricotage, la forge et la couture, les Tày démontrent une adaptabilité remarquable à leur environnement. Les femmes Tày, en particulier, sont reconnues pour leur expertise exceptionnelle dans le tissage de brocatelles, un artisanat qui allie tradition et raffinement.
Une sobriété vestimentaire distinctive
Parmi les 54 ethnies du Vietnam, les Tày se démarquent par la sobriété de leur tenue vestimentaire. L’indigo domine leurs tuniques traditionnelles en coton, tant pour les hommes que pour les femmes, avec une quasi-absence de motifs brodés ou décoratifs. Cette simplicité apparente cache cependant une richesse de significations et de variations subtiles entre les sous-groupes.
Les hommes Tày portent généralement une tunique à quatre ou cinq pans lors des occasions festives, complétée par un pantalon et des chaussures en tissu. Un bandeau ou un chapeau caractéristique vient parachever cette tenue. Les femmes, quant à elles, se parent de bijoux en argent et arborent une tunique indigo plus longue, ceinturée de soie, parfois dans des teintes vives. Chaque sous-groupe Tày apporte ses propres nuances à ces tenues, créant ainsi une diversité visuelle subtile mais significative.
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Des règles de vie complexes et riches de sens
Malgré la simplicité apparente de leur habillement, les règles de vie des Tày révèlent une complexité fascinante, régissant tous les aspects de la vie communautaire et familiale. L’emménagement dans une nouvelle demeure, par exemple, est soumis à des considérations géomantiques strictes, prenant en compte l’orientation du terrain, l’âge des occupants et le choix d’un jour propice selon leurs croyances traditionnelles.
Le rituel d’installation dans une nouvelle maison illustre parfaitement cette richesse culturelle. Le chef de famille doit allumer un feu et veiller sur la flamme jusqu’à l’aube, une pratique qui rappelle certaines traditions Kinh tout en s’en distinguant par ses particularités.
Spiritualité et culte des ancêtres
La spiritualité occupe une place centrale dans la culture Tày. Le culte des ancêtres y est profondément ancré, avec une vénération particulière pour les génies de la maison, de la cuisine et la déesse de l’accouchement, Dame Mu. La cuisine, considérée comme le cœur spirituel du foyer, abrite le génie du feu, gardien sacré du bonheur familial.
Structure familiale et traditions matrimoniales
La société Tày, de nature patriarcale, accorde une place prépondérante à l’homme et au fils au sein de la hiérarchie familiale. Bien que les jeunes jouissent d’une certaine liberté dans le choix de leur partenaire, la décision finale du mariage revient aux parents, conformément aux traditions ancestrales.
Le processus matrimonial Tày suit un protocole élaboré, comprenant plusieurs étapes codifiées :
- La demande en mariage
- Les fiançailles
- L’échange de cadeaux entre familles
- L’annonce de la date du mariage
- La cérémonie nuptiale
- L’accueil et les adieux à la mariée
Une particularité intéressante réside dans le fait que la mariée continue de vivre chez ses parents jusqu’à l’approche de la naissance de son premier enfant, moment où elle s’installe définitivement dans la famille de son époux. Les jeunes filles Tày commencent dès l’âge de 10 ans à cultiver du coton pour confectionner une couverture et deux oreillers, cadeaux symboliques destinés à leur future belle-famille.
Le jour des noces, la famille du marié assume l’entière responsabilité du festin. Celui-ci se compose de mets variés et abondants, représentant les cinq éléments (métal, bois, eau, feu et terre), tous consommés sans alcool, marquant ainsi la solennité et la spiritualité de l’événement.
Rites funéraires : entre tradition et spiritualité
Les rites funéraires Tày, bien que partageant des similitudes avec ceux des Kinh, se distinguent par leur complexité et leur signification profonde. Ces cérémonies suivent un protocole minutieux, de la préparation du défunt à la mise en terre, impliquant l’intervention de sorciers et de maîtres du rite.
Un aspect unique de ces rites est la présence obligatoire de chants et de musique funéraire, interprétés par un ensemble de cinq à six disciples. Cette tradition musicale ne se contente pas d’accompagner le défunt ; elle est perçue comme un pont entre le monde des vivants et celui des esprits.
Dans la croyance Tày, la magnificence des obsèques est considérée comme un reflet direct de la gratitude et du respect des enfants envers leurs parents décédés. Cette conception souligne l’importance capitale accordée aux liens familiaux et à la continuité générationnelle dans la culture Tày.
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Célébrations et festivités : un patrimoine vivant
Le calendrier Tày est ponctué de nombreuses fêtes principales qui rythment la vie de la communauté. Parmi celles-ci, on retrouve :
- Le Têt Nguyên Đán (Nouvel An lunaire), célébration majeure partagée avec l’ensemble du Vietnam
- La fête du 7e mois lunaire, dédiée à l’hommage aux défunts
- La fête d’appel à l’âme des buffles et des bœufs, le 6e jour du 6e mois lunaire, soulignant l’importance de l’agriculture dans leur société
- La fête du “nouveau riz”, similaire aux traditions des Thaï et des Xe Dang, marquant le cycle agricole et la dépendance à la riziculture
Ces festivités ne sont pas de simples moments de réjouissance ; elles représentent un lien vivant avec le passé et les traditions ancestrales. Elles sont l’occasion de perpétuer des pratiques folkloriques uniques, telles que les chants “luon”, “phong slu”, “phuoi pac”, “phuoi roi”, ainsi que des jeux populaires comme le “nem con” (lancer de balles étoffées), le “keo co” (tir à la corde) ou encore la danse des lions.
Ces manifestations culturelles témoignent de l’attachement profond des Tày à leur patrimoine immatériel, tout en offrant une fenêtre sur leur vision du monde et leurs valeurs communautaires.
L’ethnie Tày : un trésor culturel à découvrir
Les Tày constituent un élément essentiel de la riche mosaïque ethnique du Vietnam. Leurs traditions séculaires, profondément ancrées dans le respect des ancêtres et de la nature, offrent un aperçu fascinant de la diversité culturelle du pays. Découvrir leur mode de vie, leur artisanat raffiné et leurs célébrations hautes en couleur représente une expérience unique et enrichissante pour tout voyageur curieux.
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